Mais que faire.... [Julia]

Nuit claire. Malgré une grosse lune ronde présente dans toute sa hauteur, comme bouffie de méprit pour les humains, saupoudrant le monde d'un éclairage laiteux, une ombre sinistre s'était abattue sur la petite ville désertique de Nohrastiliân. La mort était partout. Ca se sentait. Les gens transpiraient la peur, les murs suintaient du sang des meurtres, l'air puait la haine pure. L'atmosphère était pesante, tout simplement. Mais à vrai dire, de ci de là des lumières brillaient sur les façades des bâtisses, laissant clairement apparaitre que la vie existait encore dans ce bout de pays détruit par la rage et les combats. De plus, les rues n'étaient pas totalement vide. Même à minuit passé des imbéciles trainaient minablement sans but précis, cherchant sans doute le peu de réconfort qu'ils pouvaient avoir en s'émerveillant avec les nombreuses étoiles tranquillement installées là haut...

Comme toutes les nuits dans le désert, la température baissait, ce qui avait pour conséquences que la plupart des insectes ou bestioles rentraient sous terre ou dans ce qui leur servait d'habitat. Elles étaient semblables aux êtres humains sur ce point... Ce cacher. Rentrer à la maison une fois la nuit tombée pour faire dodo. Quoi que ! La race humaine restait beaucoup moins "primitive". Une bonne cheminée, des pyjamas, ect. Elle était plutôt du genre à se calfeutrer au chaud,à se planquer dans leur semblant de baraque pour dormir dans leur lit en se sentant confient, et dans un semblant de sécurité. Amusant. Oui, réellement amusant lorsqu'un coup de pied pouvait défoncer une porte, ou que n'importe quoi -du genre petites fourmis jolies, jolies...- pouvait passer sous les planches des parquets mal joint.

Pour le moment rien ne laissait présager de problèmes ou de combats pour cette nuit. Les autres tombaient sur les gens du "Bien", avec un grand "B" car la définition du bien dépend de la personne, à n'importe quel moment, sans prévenir évidemment, et pour n'importe quelle raison. Mais ce soir tout semblait calme... Sans doute un peu de fatigue. A cette pensée, Mavin Alec Dester, un grand type maigre, assit contre un mur dans une ruelle sombre laissa échapper un petit rire mesquin d'entre ses lèvres. Les Gorgeônes fatiguaient rarement lorsqu'il était question de tuer. Difficile de dire si ils cherchaient le pouvoir ou le simple plaisir par leur meurtres et leurs tortures. En tout cas non, ils ne fatiguaient que très rarement... Et c'était bien lui qui pouvait vous le dire.

L'homme se leva. Voilà plus d'une heure qu'il était là, caché dans un coin d'ombre, sa face livide fixant le ciel. Mais il n'y avait rien de surprenant là dedans, il passait des heures dans sa solitude maladive à trainer, cherchant victimes ou un simple apaisement qui lui était encore inconnu jusqu'à maintenant. En pleine nuit il finissait toujours par rentrer au "Tube", le métro abandonné du coin. L'endroit où il s'était installé maintenant il y a un bon moment avec ceux qu'il qualifiait de congénères. De types avides, qui foutaient les jetons à n'importe qui tombait sur eux. Silencieusement il se glissa par une ouverture non loin de là, et marcha pendant une bonne demi heure dans le noir. Pas besoin de carte ou de quoi que ce soit pour se diriger, il connaissait par coeur ses tunnels. Endroit sympathique ou ses copines les araignées et autres se baladaient tranquillement... Une vague lumière finit par apparaitre à l'autre bout. Le "QG" des Gorgeônes. On pouvait sentir quelques mouvements, une vague activité dont il ne se préoccupa guère.

Personne ne le remarqua marchant dans l'ombre et sans demander son reste il fit le tour des nombreux wagons encore présents dans cet endroit et se dirigea directement vers la partie qui lui appartenait. Pas de porte, une simple planche pourrie qu'il poussa pour s'enfiler. Lourdement il se laissa tomber sur une chaise et attrapa un gros bocal en verre posé sur une tablette... Le regard bizarrement brillant il fit un petit geste de la main pour le secouer et réveiller une grosse araignée noire et velue qui se trouvait au fond qui se mit à bouger.

- J'ai un cadeau ma jolie... Et juteux qui plus est !

Rapidement il fit glisser sa main libre dans la poche de veste fatiguée et en tira un petit sachet en plastique contenant un gros papillon de nuit. Elle adorait ça. Il nourrit sa "petite" protégée et regarda dans le vide un moment. Voilà que l'ennuie le gagnait peu à peu... D'un geste las il attrapa un cahier posé non loin de lui. Un carnet de dessins. Trois ans qu'il le tenait, sans raison, ça lui était tombé dessus comme ça, la première fois qu'il avait vu... Violemment il le balança à l'autre bout de la pièce. L'image de la Miss Daly lui tournait dans la tête sans cesse depuis qu'il l'avait vu endormit, tellement... tellement... Qu'il avait eu envie de la tuer sur place ! De l'éventrer et de la pendre avec ses propres boyaux ! Mais non. Ses yeux se plissèrent dans l'ombre. Il la dessinait, une sorte d'amusement, c'était tout. Et c'était mieux que de la tuer, sinon les autres lui tomberaient dessus sans aucun doute... Pensif, Alec resta assit un moment le regard fixé dans le vide.

Effectivement, la nuit était claire, trop claire même. Aucun coin sombre pour se cacher, pour se camoufler à la faveur de l'obscurité, afin de surprendre un innocent et l'égorger. Aucun moyen de créer une embuscade, obligé de rester à la vue de l'ennemi. Les Gorgeônes n'appréciaient que très peu les nuits si claires. Oeuvrant plus volontiers dans la nuit, dans les ténèbres. C'était là qu'ils étaient le plus efficaces, et pourtant beaucoup étaient en mission ce soir. Envoyés par Joshua, ils étaient chargés de surprendre tout une bande de Menissiors. A part les concernés, presque personne ne savait exactement ce qu'ils allaient faire, mais certains pariaient, pour passer le temps, qu'ils iraient faire un petit pique-nique au clair de lune.^^ Absurde dites-vous ? Probablement, mais après tout, pourquoi pas ? L'air frais de la nuit était propice à de petites balades. Cadre romantique si on enlevait les meurtres, les cris, les pleurs. Un sentiment d'effroi parcourait la ville, mais ce n'était pas plus mal.

Julia était justement à l'extérieur. Non pas en mission, bien qu'elle aurait voulu aider. Elle avait simplement eu envie de croiser un de ces gentils petits Menissiors et d'en finir. La jeune femme pouvait être tout à fait clémente, comme elle pouvait être sans pitié. Beaucoup de choses la touchaient, mais en vivant chez les Gorgeônes, elle s'était endurcie, et elle ne ressentait pas les choses comme n'importe quelle femme qu'on trouverait ailleurs. L'influence de cette ville et tous les meurtres aux quels elle avait assisté et participé l'avaient rendue insensible à beaucoup de choses à présent. En effet, vous ne la verrez jamais avoir le moindre remord.

Dans cette nuit silencieuse, elle avait tout de même fini par tomber sur quelqu'un. Non pas un Menissior, comme elle l'espérait, mais sur un Horckiliôn. Ou plutôt c'était lui qui lui était tombé dessus, et pas seulement au sens figuré. Il avait sauté du toit d'un immeuble et l'avait mise à terre. Pendant quelques secondes, Julia avait été sonnée, mais elle s'était très rapidement remise. Le jeune homme devait avoir à peu près son âge et son pouvoir consistait apparemment à avoir l'agilité d'un félin. Il était extrêmement rapide et agile, et les coups que lui portait la Gorgeône avaient beaucoup de mal à atteindre sa cible. Elle décida alors d'utiliser une toute autre tactique. Elle se laissa mettre à terre, et lorsque le jeune homme crut avoir remporté la victoire, Julia réussit à le faire tomber sur elle. C'est ainsi que sa lame pénétra loin dans sa poitrine. La jeune femme se releva, le pull plein taché de sang et les habits écorchés. Elle avait également quelques cicatrices sur le corps, mais elle n'était pas gravement blessée.

Julia rentra ensuite au Tube, enfin. Il n'était pas si tard que ça, bien que ça ne lui changeait rien vu le peu d'heures de sommeil dont elle avait besoin. Elle parcourut les tunnels obscurs de l'ancien métro parcouru de courants d'air, puis parvint au QG. La plupart de ceux qui n'étaient pas en mission étaient là, bavardant, s'entraînant, buvant pour certains. Rien d'inhabituel en somme. La jeune femme se dirigea dans sa partie pour changer de vêtements. Elle alla également prendre une douche, car le sang tachait également sa peau. Et puis l'eau chaude désinfecterait en tout cas une bonne partie de ses blessures. Sortie de la douche, elle se vêtit d'un short noir et d'un t-shirt rouge en V. Elle ne comptait pas ressortir. Ses cheveux mouillés étaient détachés dans son dos et elle sortit de sa partie à pieds nus.

Dans les couloirs du Tube, il n'y avait presque personne. Ils étaient en salle ou dans la cuisine. C'est là-bas qu'elle se dirigeait, un petit creux au ventre. Mais alors qu'elle marchait, quelque chose de pointu entra dans la plante de son pied. Surprise par la douleur fulgurante, elle ne put s'empêcher de lâcher :

- Et m*rde !

Julia s'appuya contre la paroi et retira le petit bout de verre qu'elle avait dans le pied. Mais quelle idée aussi de se balader pieds nus dans un métro abandonné ! Un métro quelque peu laissé à l'abandon, car les Gorgeônes ne passaient pas vraiment leur temps à faire le ménage non plus. Un peu de sang coulait, rien de grave, mais la douleur la lançait. Elle n'avait pas fait attention, mais elle s'était arrêté juste devant la partie de Mavin, un homme qu'elle ne côtoyait que très peu. Elle n'y fit pas attention et resta appuyée contre le mur à essayer de calmer les élancements de son pied. Quelle ironie pour quelqu'un qui passait ses journées à se battre et qui se faisait plus mal dans son propre QG qu'à l'extérieur tout de même.

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